Il y avait à cette époque une centaine de mines exploitées entre Buckingham et Mont-Laurier. Ces opérations minières étaient axé principalement sur l’exploitation de quatre minerais: le graphite, sous la forme de plombagine (« plumbago » en anglais) ; le mica ; le phosphate, sous la forme d’apatite ; et, le feldspath. Tous ces minéraux étaient exploités dans des mines à ciel ouvert, à l’exception de la mine Back Wallingford, la plus grande mine de feldspath de la région (située dans le canton de Mulgrave-et-Derry), où l’extraction du minerai a fini par créer au fil des ans une immense grotte artificielle.
L’industrie minière va aussi donner naissance à deux autres activités de support: la navigation et le Landing.
Pour donner une idée de l’ampleur des opérations minières dans la vallée de la Basse-Lièvre, voici trois cartes montrant l’emplacement des dépôts de minerais ainsi que des mines.
Le graphite ou plombagine était principalement utilisé pour fabriquer les mines de crayons. Le lac Donaldson, situé à environ 15 km au nord-ouest de Buckingham, était le centre des opérations d’extraction du graphite. Sur les rives du lac, il y avait des usines d’extraction et de concentration. Une fois le graphite extrait, il était mis dans des sacs de jute et transporté jusqu’à Buckingham, où iI était ensuite acheminé par voie ferrée aux acheteurs. En été, le transport du minerai vers Buckingham se faisait par charrette à cheval ; en hiver, par des traîneaux tirés par des chevaux.
À la fin du 19e siècle, le mica a joué un rôle crucial dans l’implémentation d’une nouvelle source d’énergie : l’électricité. Les isolants plastiques étant inexistants à l’époque, c’est le mica, un isolant électrique naturel, qui sera utilisé comme isolateur pour empêcher les courts circuits ou les fuites de courant.
Le mica est un minerai qui se présente sous forme de fines couches (aussi appelées feuilles) superposées. Pour fabriquer les isolateurs, il fallait séparer les feuilles pour qu’elles puissent ensuite être coupées dans la forme requise. Le travail de séparation des feuilles était une opération délicate qui était principalement effectuée par des femmes qu’on appelait « effeuilleuses ».
Le phosphate est le minerai qui a le plus contribué à l’essor économique de la vallée de la Basse-Lièvre. Présente sous forme d’apatite, une roche d’une couleur vert émeraude ayant une concentration élevée en phosphate. Plusieurs mines de phosphates étaient en opération le long de la rivière du Lièvre.
Une des premières utilisations du phosphate, extrait des nombreuses mines de la région, était comme engrais chimique. La haute teneur en phosphate de l’apatite faisait en sorte qu’elle ne nécessitait qu’un simple broyage pour la réduire en granules ou en poudre pour l’utiliser comme engrais dans les champs. Une usine de broyage a été construite à Masson par M. John Fergie Higginson de Buckingham à la fin du 19e siècle.
Vers la même époque, deux entrepreneurs britanniques, messieurs William et Gibbs, ont réalisé qu’avec le potentiel énergétique de la rivière il serait possible de transformer le phosphate en phosphore en utilisant un quelconque processus électrochimique. Ainsi, en 1893, la première usine électrochimique du Canada est construite à Masson. C’est le début de l’industrie chimique dans la région.
L’utilisation de la rivière pour acheminer le phosphate vers Buckingham donnera naissance à la navigation des petits vapeurs sur la Lièvre.
Mine Emerald (Éméraude) à Glen Almond (située à environ 15 km au nord de Buckingham sur la Lièvre). La plus importante mine de phosphate de la région. Fichier source
Le feldspath a été le dernier minerai exploité à des fins commerciales dans la vallée de la Basse-Lièvre. Il servait à la fabrication de porcelaine. Les gisements présents dans la vallée étaient d’une pureté exceptionnelle. La majorité de la production était utilisée pour la production de dents en porcelaine pour les dentiers. Le feldspath a été exploité à partir des années 1930, et ce jusqu’en 1972. L’usine de concassage de Buckingham, la Canadian Spar (« spar » est le nom anglais pour feldspath), broyait le minerai dans son établissement située à l’endroit même où se trouve aujourd’hui le garage municipal. Une grande fresque peinte sur la façade du garage nous rappelle la présence de l’usine.